EMILE ET MAX SONT DANS LE MEME BATEAU

EMILE ET MAX SONT DANS LE MÊME BATEAU

Entre 2009 et 2017 ont paru trois livres plutôt destinés au grand public (en tout cas aux lecteurs non sociologues) et ayant pour objectif de présenter ou de défendre la place et l’intérêt de la sociologie. Le plus récent, « Le danger sociologique » de Gerald Bronner et Etienne Gehin paru en 2017 ("le danger sociologique" ) est celui qui a le plus fait parler puisque parfois présenté comme « rallumant la guerre entre les sociologues ». Mais dès avant cela, Bernard Lahire avait publié « Pour la sociologie et en finir avec la prétendue culture de l’excuse » ( "Pour la sociologie")  en 2016, à la suite des propos de Manuel Valls sur la « culture de l’excuse » et d’un pamphlet de Philippe Val fustigeant le « sociologisme ». Enfin, plus ancien et plus discret, « Le bêtiser du sociologue » de Nathalie Heinich a paru en 2009  ("Le bêtisier"). Ces trois livres ont pour point commun de vouloir défendre la pratique de la sociologie comme connaissance du monde mais ils s’opposent sur bien des points du fait de leur inscription différente dans les diverses traditions sociologiques. En effet, si Bernard Lahire s’inscrit clairement dans la continuité de Durkheim et Bourdieu et la sociologie holiste du fait social, Bronner et Gehin revendiquent plutôt leur filiation envers Max Weber et Raymond Boudon, dans la lignée de la sociologie « compréhensive », de l’action sociale et de la plus récente « sociologie cognitive ». Enfin, Nathalie Heinich qui fut une ancienne élève de Pierre Bourdieu revendique aussi son appartenance à la lignée de Max Weber.

Deux grandes familles

On peut rappeler à (trop) grands traits les différences entre ces deux familles sociologiques. Pour les durkheimiens, l’individu est un produit du groupe ou de la société : l’enfant est dès sa naissance, façonné par le groupe. Par exemple, on sait qu’un nouveau-né est équipé pour parler n’importe quelle langue mais du fait du « façonnage » par son entourage il sera au bout de quelques années incapable de prononcer certains sons ou d’entendre des différences d’intonation propres à une autre langue que la sienne. Bref, il aura  pris des habitudes linguistiques propres à son groupe qu’il aura le pus grand mal à dépasser. Dans cette optique, on peut considérer que l’ensemble des manières de faire, d’être de parler ou de penser des individus sont transmises  par le groupe. On retrouve ici les lignes de force de la « contrainte sociale » selon Durkheim ou de l’habitus chez Bourdieu. Cependant, l’observation commune montre que les individus sont capables d’autonomie et de penser ou d’agir selon des conduites que l’on n’attendait pas forcément de leur part. Bref, les individus sont capables d’autonomie et d’initiative. Pour Max Weber, il faut démarrer l’analyse des actions individuelles et du sens (de la signification) que les individus donnent à leur action. Ainsi Max Weber distinguait les actions individuelles selon quatre logiques : la rationalité en finalité (on utilise les moyens les plus adaptés pour aboutir à un objectif), rationalité en valeur (on agit avant tout pour défendre des valeurs que l’on soutient même si cela doit nous nuire), traditionnelle (on agit presque  « mécaniquement » selon la tradition ou selon nos habitudes et routines), enfin actions dites « affectuelles » (on agit sous le coup d’une émotion, négative ou positive, comme la colère ou la  joie). C’est la démarche que reprendra Raymond Boudon sans considérer que l’homme est forcément rationnel en finalité (l’individualisme méthodologique de Boudon est différent de celui des néo classiques) et durant les dernières années de sa carrière il développera l’idée que les individus n’agissent pas forcément de manière parfaite dans le sens où ils sont soumis à toutes sortes de biais cognitifs qui faussent leur jugement : émotions, erreurs d’appréciations,… c’est dans cette optique, à l’intersection de la sociologie et de la psychologie, que se situent également Bronner et Gehin.

           On peut donc opposer les trois livres analysés en mettant face à face, d’un côté les ouvrages de Bronner/Gehin et Heinich et de l’autre, le livre de Lahire. Ces auteurs n’hésitent d’ailleurs pas à marquer leurs oppositions mutuelles dans leurs écrits (ainsi, Heinich critique fortement le travail fait autour de « l’homme pluriel » par Lahire). Mais chacun rejette la thèse opposée en s’attaquant à une version extrême de celle-ci. Ainsi, Heinich et Bronner s’en prennent aux théories du soupçon qu’ils estiment d’ailleurs être à l’origine du discrédit de la sociologie dans le grand public. Il ne faut pas nier que les formes les plus extrêmes de la théorie du soupçon ont pu exister, notamment durant les années 1970 : celles-ci présentent l’individu comme un automate social ou un « idiot culturel » qui serait finalement manipulé par des forces sociales cachées (les medias, le « grand capital »,…). Heinich et Bronner reprochent à ce genre de démarche de ne pas voir les marges de manœuvre des individus, de ne pas faire apparaitre les effets d’émergence (c'est-à-dire la manière dont l’agrégation des conduites individuelles peut donner un résultat inattendu) et en postulant a priori l’existence de forces cachées, ces thèses nous font passer à côté de mécanismes réellement à l’œuvre (pour avoir de bonnes illustrations de ces critiques on peut lire les livres de Raymond Boudon comme « la logique du social » ou « la place du désordre »). De son côté, Lahire critique l’approche individualiste en rappelant qu’il n’existe pas « d’individu monade » (c’est à dire sans aucun lien avec son environnement), et qu’il s’agit d’une fiction philosophique et juridique. Il n’a pas de mal à en faire la critique à partir de l’Homo-Oeconomicus utilisé en économie (qui a pu faire de sacrés dégâts si on pense, par exemple, à l’utilisation de la thèse des anticipations rationnelles) ou s’en prenant à certains passages du livre de Philippe Val

Sans nul doute, les deux extrêmes de « l’individu automate » et de « l’individu monade » ont existé et les auteurs ne fabulent pas quand ils les critiquent. Mais ces extrêmes sont ils vraiment les plus fréquents et en les mettant ainsi en avant, ne risquent ils pas de participer conjointement à la délégitimation de la sociologie ? Mais au moins, ils échangent ! Fut-ce dans la polémique : dans les années 1970 Baudelot n’hésitait pas à critiquer vertement et nommément Raymond Boudon, de même que Bourdieu le faisait (mais sans le nommer) et Boudon n’hésitait pas à remettre en cause Bourdieu ou Foucault. C’était parfois violent mais au moins les choses étaient dites. 

Nuances et rapprochements relatifs

Nos trois auteurs ne sont donc pas sourds aux critiques qui leur sont faites mais ils considèrent qu’en s’adressant à des versions extrêmes de leurs thèses, ces critiques « tapent à côté ». De fait, ils ont soin de montrer comment leur propre approche doit être nuancée. Ainsi, Bernard Lahire montre que les approches en termes d’habitus n’ignorent pas l’existence d’un individu capable d’initiative personnelle. Lahire ne reprend pas l’idée d’un habitus homogène mais montre que l’habitus (ou les habitus) d’un individu sont le produit de l’ensemble des expériences qu’il a pu traverser au cours de sa vie (on peut, dès lors, aisément remplacer le terme d’habitus par celui de socialisation plurielle). L’individu est alors capable d’initiatives et de stratégie (ce que Bourdieu suggérait également) mais dans le cadre  de ses façons d’être et de penser, ses réactions,…façonnées par ses expériences passées. Ainsi que l’écrit Lahire en se posant la question du consentement individuel  « il faut toujours se demander quel type d’individu donne son consentement  à la suite de quoi et dans quelles conditions ». De leur côté Bronner et Gehin n’envisagent pas non plus un individu absolument libre de toute attache. Il faudrait toujours rappeler combien l’individualisme méthodologique des sociologues a toujours été différent des l’individualisme méthodologique des économistes. Boudon le rappelle : alors que le deuxième comprend six axiomes (individualisme, compréhension, rationalité, instrumentalisme, égoïsme, maximisation), Max Weber ne retenait que trois axiomes (individualisme, compréhension, rationalité) et Raymond Boudon que deux (l’individualisme et la compréhension.). Nous n’avons donc pas chez les sociologues le mythe de l’individu parfaitement informé et, alors que chez beaucoup d’économistes néo-classiques l’agrégation des comportements individuels aboutit à de l’ordre (à un équilibre par exemple) chez les sociologues on peut fort bien aboutir à du « désordre » ou un « autre ordre » (voir les multiples exemples donnés par Raymond Boudon dans « La place du désordre »). Bien au contraire, la sociologie cognitive envisage l’individu handicapé par de multiples biais cognitifs (voir ici). Certes les économistes entament aussi ce type d’approches avec par exemple, les asymétries d’information (mais on reste dans le cadre d’un simple amendement au modèle de base) ou avec l’économie expérimentale empruntée aux psychologues et psychologues sociaux (on s’amuse d’ailleurs de voir que certaines découvertes récentes des économistes expérimentaux retrouvent des démarches et/ou des résultats établis par les sociologues dès les années 40). Bronner et Gehin n’excluent pas d’analyser les actions de l’individu dans le cadre des contraintes qu’il rencontre. Grosso-modo, et sans surprise, on voit finalement deux types de sociologues partir de points de vue opposés et faire le chemin en direction de l’autre. Cependant, il serait naïf de supposer qu’ils trouveraient miraculeusement une synthèse, un point d’entente, à mi-chemin de leurs parcours respectifs. Il s’agit moins de deux cheminements se faisant sur une même route que du tracé de deux routes qui vont en sens inverse l’une de l’autre mais ne sont pas forcément amenées à se rencontrer.

Il y a tout de même de vrais points de convergence. Les quatre auteurs s’accordent pour donner toute son importance à la notion de compréhension en sociologie. Certes, à la différence de Lahire, Bronner/Gehin et Heinich utilisent ce concept comme point de départ de l’analyse, savoir quelle signification un individu donne à son action, alors que Lahire préfère partir des attributions incorporées (habitus) mais il les rejoint quand il s’agit de dire que la sociologie n’a pas pour objectif de juger, condamner ou excuser un acte mais seulement de l’expliquer. Le jugement et la condamnation sont de la responsabilité de la justice, non de la science. Par ailleurs, le concept d’habitus ne rebute pas particulièrement Bronner et Gehin qui l’accepteraient dès lors qu’on pourra situer l’habitus « matériellement » dans le fonctionnement neuro-cognitif. Ensuite, se pose la question de la clôture de la sociologie vis-à-vis des autres disciplines scientifiques. On sait que l’établissement de cette clôture fut un des grands travaux de Durkheim qui récusait la possibilité d’expliquer un fait social autrement que par un autre fait social, c’est à dire par la psychologie ou la biologie. Cette clôture était peut-être nécessaire pour assurer l’institutionnalisation de la discipline (bien que Tarde ou Simmel nous aient offert d’autres voies) mais aujourd’hui les différents auteurs s’accordent sur la nécessité de s’ouvrir, mais pas forcément sur les mêmes disciplines. Il ya un bon moment déjà que les sociologues ont intégré les résultats de la psychologie sociale (la polarisation des décisions, l’effet Asch, l’endo-groupe, les expériences sur le changement dans les groupes de Kurt Lewin,…). Gerald Bronner et Etienne Gehin vont plus loin en envisageant d’intégrer également les sciences cognitives et même les neuro-sciences : le programme sociologique de Gerald Bronner c’est « Voir comment les invariants cognitifs s’hybrident avec les variables sociales pour former cet objet sans cesse renouvelé et pourtant toujours borné dans un espace restreint qu’il est convenu d’appeler la vie en société » . Programme légitime mais qui n’est pas sans chausse-trapes dans un domaine où les connaissances ne sont pas toutes vraiment stabilisées et où les dérives idéologiques sont légion. De plus, il faut voir que son travail n’est pas sans lien méthodologique avec les démarches des économistes puisqu’il ne dédaigne pas utiliser la modélisation (qui est plutôt pratiquée en économie bien qu’on en retrouve depuis longtemps en sociologie) et qu’il utilise fréquemment l’image du marché  (notamment du « marché de l’information » pour parler des croyances).

 

Les oubliés de la famille

Mais il reste un angle mort qui n’est véritablement abordé par aucun de ces auteurs, si ce n’est par Lahire quand il rappelle que la sociologie permet de répondre « relationnellement » (ce qui était, rappelons le, le principe méthodologique majeur d’Auguste Comte même s’il récusait l’approche individualiste). Ce qui compte ce n’est ni l’individu ni le groupe mais les relations s’établissant entre les individus ou entre les groupes ou entre les individus et les groupes. Il y a plusieurs manières d’appréhender l’interaction. La plus simple, malgré ses raffinements mathématiques, est la théorie des jeux : deux acteurs et deux stratégies dans ses versions basiques. Son mérite est de montrer dans quelles conditions les stratégies des acteurs peuvent aboutir à une situation sous-optimale Mais, contrairement aux apparences, il ne s’agit pas d’une analyse individualiste car les règles du jeu sont données de l’extérieur et que les acteurs n’obéissent qu’à une seule logique de maximisation. Il est en réalité bien des cas où les acteurs cherchent à modifier les règles du jeu elles mêmes. Une bonne partie du travail d’Erving Goffman repose sur cette idée. Les individus sont engagés dans des interactions dangereuses dans lesquelles ils risquent de «perdre la face ». On peut rappeler (de mémoire) cette anecdote rapportée par Goffman.

« Durant un bal de fin d’année un jeune homme s’adresse à un jeune fille :

  • Vous dansez ?
  • Non ! Je joue au basket
  • Excuse-moi, j’aurais du le deviner en voyant comme tu es habillée »

 

Au-delà du caractère anecdotique de ce camouflet, on voit que le passage de la question à la première réponse constitue une tentative de changer le cadre de l’échange pour faire perdre la face à l’autre ; la jeune fille tente alors de changer la règle du jeu. Les enseignants de lycée ne découvrent rien si on leur dit que lors d’éventuels accrochages avec leurs élèves, si certains restent dans le cadre des règles de l’échange prédéterminé (en s’opposant au professeur en tant que professeur), d’autres tentent, consciemment ou non, de changer les règles de l’échange. Quand on parvient à changer ces règles on parvient également souvent à transformer la « définition de la situation » (Thomas, Znaniecki).

Donc, on peut approcher cette situation de trois manières. La situation en cours peut être définie de l’extérieur : par exemple, le cours tel qu’il doit se dérouler est défini par le fait que le professeur a été désigné, que le règlement intérieur lui donne un ascendant sur les élèves, etc… On peut également dire que dans le cadre de ces contraintes, les élèves ont une marge d’autonomie certaine face au professeur (pour obéir, échapper au  contrôle professoral, contester,…) mais aussi que les formes de la contestation peuvent être liées à un habitus spécifique (très probablement un habitus de classe). On peut aussi s’intéresser à la manière dont les diverses interactions entre le professeur et les élèves ou entre les élèves entre eux définissent la situation (on trouvera ici un texte destiné aux élèves pour mieux comprendre cette diversité d’approche : Méthodes et théories sociologiques ). Il est également possible de trouver des cas où la situation est entièrement définie par les interactions car les statuts respectifs des intervenants ne sont pas clairement déterminés et que leur établissement se fera par tâtonnements. On trouvera un certain nombre d’exemples de cet ordre dans « Stigmates » d’Erving Goffman. De même, dans des domaines et avec des méthodes et des objectifs différents Marx et Sheriff nous ont montré que le groupe et l’interaction (en l’occurrence le conflit) sont co-constituants (cf : Sheriff dans une expérience faite dans une colonie de vacances a monté combien il était facile de créer une conscience de groupe et une hostilité inter-groupe en mettant des enfants en compétition). De même, le concept de champ utilisé par Bourdieu relève de la même logique : le champ n’est pas institué a priori mais ce sont les acteurs qui, en s’opposant autour d’une ou des questions en particulier, finissent par créer ce champ qui, en retour, finira par contraindre leur action.

Ici, entre Durkheim et Weber, vient s’intercaler un troisième ancêtre, Georg Simmel, qui a participé à la toute première association de sociologie allemande (avec Tönnies et Weber). Simmel ne parlait pas d’interaction mais « d’action réciproque » et il s’agissait là du concept central de la sociologie « telle qu’il l’entendait » (c’est l’expression qu’il utilisait souvent, montrant ainsi son absence de dogmatisme méthodologique). On peut, dans une certaine mesure, rapprocher les « configurations » propres à Norbert Elias (dont Nathalie Heinich est une spécialiste) des « formes » de Simmel résultantes des multiples actions réciproques et, finalement, la notion de « champ » de Bourdieu n’en est pas non plus si éloignée. Peut-on démarrer l’analyse à partir de l’interaction elle-même ? Je le crois. Gerald Bronner, pour sa part, récuse l’utilisation de la notion de champ dont il craint la réification (en cela, il me fait penser à la façon dont Durkheim rejetait la notion de « forme » proposée par Simmel).

S’il me faut trouver un ancêtre, j’opte volontiers pour Simmel ; avant tout parcequ’il indique que l’action réciproque est la base de la sociologie mais aussi parcequ’il parle de la sociologie « telle qu’il la conçoit » et qu’il ne rejette donc pas d’autres approches. Dans certains de ses écrits (« philosophie de l’argent ») il indique bien que les diverses approches sont valables suivant l’objet étudié et le niveau observation adopté (ce qui n’est pas étonnant vu que ses objets de prédilection vont de la Religion à l’échange de regards).

Quel enseignement de la sociologie ?

La défense de la sociologie passe-t-elle par l’Ecole ? Celle-ci n’est enseignée au lycée que dans les cours de Sciences Economiques et Sociales. Elle ne touche donc qu’une minorité d’élèves. Bernard Lahire propose de l’enseigner dès l’école primaire, non en enseignant des auteurs et des théories, mais en faisant faire de petites enquêtes et de l’observation aux enfants. Bronner craint qu’un enseignement en primaire amène à exposer de jeunes enfants aux thèses déterministes et à leurs éventuels effets performatifs. En revanche, dans « La démocratie des crédules » Gerald Bronner propose qu’on initie les lycéens à la maitrise de l’information afin de les aider à lutter contre les croyances non fondées qui trainent sur Internet (voir à la fin de la note de lecture ici).

Conclusion : quelle guerre ?

Guerre des sociologues ? Non ! Il faut seulement se rappeler que la réalité échappe définitivement à notre entendement et que le mieux que nous puissions faire c’est de multiplier les angles d’attaque pour s’approcher de la connaissance du monde social. Une théorie n’est jamais qu’un éclairage particulier sur le monde mais le propre d’un éclairage c’est de porter de l’ombre tout en émettant de la lumière : par exemple, si les approches marxistes sont indépassables pour comprendre la question du pouvoir, elles tendent à laisser dans l’ombre le caractère individualiste, chevaleresque et irrationnel de l’innovateur schumpeterien. Il ne faut cependant pas espérer aboutir à une synthèse ultime dépassant toutes les autres (une lumière qui ne porterait pas d’ombre supprimerait tout contraste et ne permettrait aucun regard sur l’objet) et je suis personnellement agacé par ses théoriciens qui proposent régulièrement de « dépasser de fausses oppositions ». Donc le mieux qu‘on puisse faire c’est enseigner les différents angles d’approche - individualisme méthodologique, holisme, interactionnisme - tout en connaissant leurs limites respectives. Mais pas seulement ces trois approches, il faut aussi présenter tout ce qui se loge dans les interstices de ces trois grandes familles d’approches  comme la « définition de la situation » ou la connaissance des biais cognitifs. Mais il y a là un énorme travail de sélection à faire.

 

 

Commentaires

  • Mayo Naise
    • 1. Mayo Naise Le 31/05/2023
    Mettre Bronner et Lahire dos à dos, ce n'est pas très honnête : l'un est la risée de la sociologie française, l'autre est sa rockstar
    • thierry rogel
      • thierry rogelLe 31/05/2023
      C’est dommage d’envisager la recherche en sociologie comme un défilé de top-modèles.

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