L'économie post-keynésienne Histoire, Théories et Politiques
L'économie post-keynésienne Histoire, Théories et Politiques
(Sous la direction de Eric Berr, Virginie Monvoisin, Jean-François Ponsot - Préface de James K. Galbraith)
Avertissement : l’ouvrage étant constitué de contributions indépendantes de divers auteurs, il peut y avoir des redites d’un article à l’autre. J’ai donc choisi de ne pas suivre l’ordre des chapitres du livre
- PRESENTATION
Objectif de l’ouvrage (Postface de Alain Parguez)
Les auteurs de l’ouvrage proposent une autre lecture de l’économie que celle qui s’est imposée dans le cadre de l’économie « mainstream » en se référant aux aspects les plus radicaux et novateurs de Keynes et ils s’opposent donc non seulement aux travaux néo-classiques mais également aux keynésiens dits « de la synthèse » et aux néo keynésiens. Rappelons qu’on peut caractériser à grands traits la vision néo classique du monde économique comme celle d’individus rationnels et parfaitement informés pour lesquels le futur, s’il n’est pas connu, est probabilisable. Ils agissent dans le cadre d’une « économie de production », menée par l’offre et marquée par une dichotomie entre la sphère réelle et la sphère monétaire (la monnaie, instrument neutre, étant introduite après coup dans les échanges). Les économistes post-keynésiens conservent les aspects les plus radicaux de Keynes : la réfutation de la loi de Say, l’incertitude radicale, la prise en compte des esprits animaux ainsi que des conflits de répartition, le renversement du lien épargne-investissement, le refus de la dichotomie monétaire–réel, l’endogénéité de la monnaie, le refus de la théorie quantitative de la monnaie.
Précurseurs (chapitres 1 à 6)
Les Post-Keynésiens tirent leur inspiration de quatre précurseurs - Michal Kalecki (conflits de répartition), Joan Robinson (conflits de répartition et réfutation de la fonction de production), Nicolas Kaldor (endogénéité de la monnaie) et Hyman Minsky (incertitude radicale et instabilité financière) – et, dans le chapitre 6, Marc Lavoie et Jean François Ponsot distinguent cinq courants – « américain », kaleckien, sraffaien, kaldorien et post-keynésien institutionnaliste. Cependant, si les post–keynésiens s’opposent résolument aux néoclassiques et aux économistes de la synthèse, ils envisagent des rapprochements et échanges possibles avec la théorie de la régulation et avec les institutionnalistes.
- L’INCERTITUDE RADICALE (Chapitre 8)
Le futur est-il probabilisable ?
Keynes retenait quatre cas possibles concernant l’usage des probabilités : les probabilités sont possibles et entièrement numériques, on peut faire un encadrement probabilité, on peut seulement classer les probabilités, enfin il n’y a aucun classement possible des évènements. Pour ce qui est de l’analyse du futur, Keynes considérait que le dernier cas était le plus fréquent, d’où sa célèbre phrase : « Nous ne savons pas, tout simplement ». Il faut donc abandonner l’espoir de probabiliser le futur et nous sommes dans une situation d’incertitude radicale. Par conséquent, l’individu rationnel et calculateur (et a fortiori celui qui est muni d’anticipations rationnelles) n’est guère utile pour l’analyse et subsistent seulement les « esprits animaux » (vagues d’optimisme et de pessimisme) et le recours aux conventions (qu’on retrouve dans le fameux « concours de beauté ») lesquelles ne constituent pas des optimums probabilisables. Analyser les comportements des agents suppose donc d’intégrer des données psychologiques autres que la rationalité des Néo-Classiques. Keynes retient trois lois psychologiques fondamentales : la décroissance de la propension à consommer avec le revenu, l’euthanasie des rentiers et la préférence pour la liquidité. A l’inverse des Post-Keynesiens, les Néo-Classiques estiment que le futur est probabilisable mais cela implique qu’il ressemble au passé : on se situe alors dans un temps réversible. Un futur semblable au passé est de toute évidence une « hypothèse héroïque ». L’économiste doit alors introduire un temps irréversible, un temps historique.
- MONNAIE ET FINANCE (chapitres 9, 13, 20, 21)
Nature de la monnaie
Les Post-Keynésiens récusent la « fable du troc » qui fait de la monnaie un instrument neutre d’échange. Pour eux, la monnaie peut être désirée pour elle même (« préférence pour la liquidité »), ils rejettent donc l’idée de dichotomie « monétaire/réel » des classiques et néoclassiques et retiennent l’idée d’une « économie monétaire de production ». De plus, ils adoptent l’hypothèse de « monnaie endogène » : ainsi la création de la monnaie n’est pas à l’initiative de la Banque Centrale mais provient des demandes de crédit des entreprises pour leurs besoins de production auxquels répondent les banques commerciales qui se refinancent ensuite auprès de la Banque Centrale. Cette situation entraine plusieurs conséquences essentielles :
+ Puisque l’offre de monnaie est endogène, les banques commerciales ne sont pas de simples intermédiaires mais créatrices de monnaie. Le schéma « Epargne => Investissement » est donc remplacé par « Investissement=> Epargne ». Il n’y a pas besoin de l’existence d’une épargne préalable pour financer les investissements.
Finance
Deux chapitres du livre sont centrés sur la question financière : le chapitre 5 consacré à Minsky et le chapitre 13 qui traite de la financiarisation de l’économie. Pour Minsky, la finance est intrinsèquement instable (les crises financières sont donc endogènes). Le cycle proposé par Minsky est bien connu : dans la phase ascendante du cycle, la confiance s’installe et pousse les individus à s’endetter pour investir et acquérir des actions, ce qui va inciter à la détention d’actifs financiers au détriment d’actifs liquides. Il en résulte une réduction de la liquidité globale de l’économie et un poids excessif de l’endettement à court terme. Les banques vont renforcer ces tendances par les innovations financières qu’elles développent. Bien entendu, cette situation tend à fragiliser le système financier mais cette fragilité va également et surtout dépendre du type d’agents en présence, notamment de la présence de «spéculateurs » et d’agents « Ponzis » :
+ Les agents spéculatifs remboursent les intérêts mais pas le principal et devront donc reconduire leur dette.
+ Les agents « Ponzi » sont quant à eux, plongés dans une fuite en avant, ils ne peuvent rembourser ni l’intérêt ni le principal et accroissent leur endettement de période en période.
La prolifération de « spéculateurs » et de « ponzis » accroit donc la fragilité de l’ensemble du système : on est dans une situation « d’incertitude forte » et ce sont les « esprits animaux », la confiance et les conventions qui dominent (au détriment du calcul probabilisable)
Financiarisation de l’économie
Le chapitre 13 est consacré au coût du capital et à la financiarisation de l’économie. Les auteurs rappellent qu’historiquement, le coût du capital a pu prendre plusieurs formes : la rente foncière (Ricardo), le profit des entreprises (Marx), le taux d’intérêt déterminé sur le marché des fonds prêtables (néo-classiques). Aujourd’hui, avec la financiarisation croissante de l’économie, le coût du capital est déterminé par la norme d’exigence des actionnaires. Cependant, les auteurs distinguent le coût du capital correspondant à un service d’intermédiation financière du coût du capital correspondant à une rente de situation (qui pose la question de la répartition – voir infra). De la différence entre ces deux coûts on peut déduire le « surcoût financier » : dans les années 60-70 ce surcoût était nul, voire négatif mais il va augmenter fortement à partir des années 80 sous l’effet de l’augmentation des taux d’intérêt réels, des dividendes et de la rémunération des dirigeants de grandes entreprises. Cette augmentation du surcoût est source d’instabilité et a deux conséquences dommageables :
- Elle procède à une redistribution en faveur des actionnaires et au détriment des salariés. Elle a donc un effet délétère sur la consommation et la croissance.
- Elle entraine une polarisation sur les projets d’investissement les plus rentables à court terme
On peut rajouter que les entreprises ont, de plus, pour stratégie de racheter leurs propres actions.
Il en résulte que les marchés perdent leurs fonctions attendues : ils ne financent plus les entreprises mais sont financés par elles.
Politique monétaire
L’efficacité de la politique monétaire de la BC, sans être inexistante, est largement amoindrie. Pour les Post-Keynésiens l’action sur les quantités n’est pas possible (rejet du concept de multiplicateur de crédit), seule l’action par les taux d’intérêt directeurs peut faire effet. Mais la politique monétaire, si elle peut avoir une certaine efficacité pour ralentir l’activité, est en revanche inefficace en cas de crise (y compris les politiques monétaires non conventionnelles). Dans les différents chapitres, les auteurs retiennent trois à cinq grandes catégories de Politiques Monétaires Non Conventionnelles : le Quantitative Easing, l’assouplissement qualitatif, (ou qualitative easing, les BC rachètent les actifs dont le marché ne veut plus), l’allongement du refinancement à long terme, les taux d’intérêt négatifs et le « forward guidance », mais ils montrent qu’elles sont globalement inefficaces et qu’elles risquent surtout d’augmenter l’instabilité financière à long terme. C’est donc la nature même de la politique monétaire qui est questionnée. Pour les Post-Keynesiens, l’offre de monnaie est endogène et les taux d’intérêt directeurs sont exogènes (sauf pour Minsky qui endogénéise les taux d’intérêt directeurs).
La Banque Centrale a dans ce cas trois rôles :
+ Fournir la liquidité à court terme en cas de crise financière. Pour Minsky, son rôle de préteur en dernier ressort permet d’éviter la chute des prix des actifs.
+ Favoriser le recours à l’endettement de long terme plutôt que de court terme.
+ Guider l’évolution du système bancaire par la réglementation prudentielle
Les propositions de Politique monétaire postkeynésienne
Dans le chapitre 20, les auteurs rappellent que depuis 1945 quatre courants ont dominé successivement la pensée en matière de politique monétaire.
De 1945 à 1974, la pensée en ce domaine est dominée par le keynésianisme (politique monétaire discrétionnaire, arbitrage emploi-prix). Les monétaristes vont s’imposer de 1974 à 1982 en réhabilitant la théorie quantitative de la monnaie et en prônant le contrôle de la masse monétaire afin de stabiliser l’inflation. De 1982 à 1992, la Nouvelle Economie Classique imposa l’idée d’indépendance des banques centrales au nom de la crédibilité. Enfin, depuis 1993 c’est la Nouvelle Economie Keynésienne qui a imposé, à partir de la règle de Taylor, le ciblage de l’inflation autour de 2%.
Pour les Post-Keynesiens, il n’y a aucune raison de se crisper sur l’inflation (voir supra), les objectifs sont multiples : croissance, emploi, inflation, balance extérieure (cf Kaldor). Le taux d’intérêt directeur est l’instrument principal de la politique monétaire mais les Post-Keynésiens insistent sur le fait que le contrôle doit moins porter sur la quantité de monnaie en circulation que sur la qualité de ses contreparties. La qualité de l’actif de la banque de second rang est donc la situation sine qua non de la stabilité monétaire et financière. Les Post-Keynésiens renouent avec les keynésiens des Trente Glorieuses dans la mesure où ils privilégient des Politiques monétaires discrétionnaires avec, tout de même, une contrainte de stabilité à court terme. Cependant, il n’y a pas, chez les Post-Keynesiens, de consensus quant à la règle de politique monétaire à adopter (notamment sur le partage entre règles « actives » discrétionnaires à court terme et règles « passives » fixes). Enfin, ils se prononcent pour la séparation entre les banques d’affaires et les banques de dépôts.
L’architecture monétaire et financière internationale (chapitre 21)
Les Post-Keynésiens estiment que la théorie standard est inadaptée pour comprendre le régime monétaire et financier actuel et proposer des solutions. Ce régime est marqué par les « quatre I » :
+ Instabilité : l’Instabilité financière est caractérisée par une forte volatilité des mouvements de capitaux dans les économies émergentes.
+Incertitudes : les incertitudes générées par la suprématie du dollar.
+ Insuffisance : insuffisance de la demande globale car, aujourd’hui, la charge de l’ajustement des déséquilibres de balance des paiements porte sur les pays déficitaires.
+ Iniquité liée à des phénomènes d’asymétrie : les EU n’assument pas les charges d’ajustement, peuvent mener des politiques autonomes et ce alors même qu’ils peuvent s’endetter dans leur propre monnaie. A l’inverse les pays émergents sont dépendants du fait de leur obligation de s’endetter en devises étrangères.
Les Post-Keynésiens tirent leurs idées du plan Keynes refusé à la conférence de Bretton-Woods et proposent le développement d’une monnaie et d’une banque véritablement internationales. La charge d’ajustement des balances de paiement doit être partagée entre pays déficitaires et pays excédentaires et les prêts accordés aux pays déficitaires doivent donner lieu à une émission de monnaie par la Banque Centrale du pays excédentaire.
- LA POLITIQUE BUDGETAIRE (chapitre 17)
Alors qu’elle était plébiscitée entre 1945 et 1975, la politique budgétaire est passée aujourd’hui au second rang. Pour les économistes Post-Keynesiens, elle devrait au contraire passer devant la politique monétaire. Pour saisir cette position, il faut revenir à la relation épargne-Investissement. Pour les NC, il faut une épargne préalable à l’investissement : dans ces conditions il est cohérent d’augmenter les inégalités et de favoriser les plus riches afin de générer l’épargne. Il est également cohérent de s’inquiéter du financement du déficit budgétaire par l’endettement qui risque de provoquer un effet d’éviction. Mais si, à la suite de Keynes, on renverse la relation en montrant que c’est l’investissement, par son effet multiplicateur, qui génère suffisamment de revenus pour développer l’épargne alors il n’y a guère de raisons de craindre un effet d’éviction puisque l’épargne n’est plus un préalable à l’investissement. De plus, le déficit budgétaire relançant l’activité économique, permet de renverser les anticipations des agents. Le problème de la dette passe alors au second rang.
- INFLATION ET REPARTITION (chapitres 10 et 11)
L’inflation
Pour les courants orthodoxes, l’inflation est partout et toujours un phénomène monétaire et doit être combattue par une politique monétaire. Deux apports théoriques s’imposent : la théorie quantitative de la monnaie et la prise en compte du taux d’intérêt naturel (cf wicksell). Pour les Post-Keynesiens, l’inflation n’est pas nécessairement néfaste et elle n’est pas seulement un phénomène monétaire. Elle doit d’abord s’analyser comme la conséquence d’un conflit de répartition entre profits et salaires (associée au pouvoir de négociation des salariés), à une insuffisance de productivité et au pouvoir de marché des entreprises. Pour les Post-Keynesiens, l’hyperinflation est liée à une augmentation de la vitesse de circulation de la monnaie (Kalecki), à une dépréciation du taux de change (Robinson) mais il n’y a pas de lien direct entre l’inflation et l’hyperinflation (il n’y a donc pas lieu d’être obnubilé par une norme d’inflation à 2%).
Répartition
Les enjeux de la répartition sont au cœur des perspectives des Post-Keynésiens, répartition fonctionnelle (salaires/profit) ou interpersonnelle (niveaux de salaire) dans la lignée de Marx, Kaldor et Kalecki. La répartition agit sur l’inflation (voir supra) mais également sur l’accumulation. Si les économistes Post-Keynésiens acceptent un certain niveau d’inégalité, il faut que celui-ci maximise la croissance économique et permette d’atteindre le plein-emploi des ressources productives. En pratique, ces inégalités doivent être faibles. Or on sait que depuis les années 80 les inégalités ont fortement augmenté (notamment en faveur des 1% les plus riches) et qu’il y a eu un découplage « salaires/productivité ». Comment expliquer ce découplage ? Pour les Néo-Classiques et les Néo-Keynésiens, l’accroissement des inégalités s’explique par l’émergence d’innovations et par la mondialisation. Pour les Post-Keynésiens, elles sont dues à la mondialisation, à la baisse des dépenses publiques, à la financiarisation de l’économie, à la déréglementation du marché du travail et surtout au déclin du pouvoir de négociation des salariés. Il faut donc réduire ces inégalités par l’impôt progressif, les aides aux plus pauvres, un accès facilité aux services publics.
- EMPLOI ET INEGALITES (Chapitres 12, 18, 19)
Pour ce qui est de l’emploi, les économistes Post-Keynésiens s’opposent point par point aux économistes Néo-Classiques. Alors que les Néo-Classiques font une analyse « coté offre », les Post-Keynésiens privilégient la demande. Pour les Néo-Classiques, les rigidités du marché du travail sont source de chômage et celui-ci est volontaire et naturel ; les Post-Keynésiens rejettent l’idée de chômage naturel. Enfin, les Néo-Classiques retiennent l’hypothèse de coût marginal croissant alors que pour les Post-Keynésiens ils sont décroissants. Enfin, chez les Post-Keynésiens il n’y a pas d’unicité de l’équilibre. Donc, pour les Post-Keynésiens les rigidités et les conventions et l’augmentation des salaires réels (surtout si elle accompagne une augmentation de la productivité) sont favorables à l’emploi Une des solutions les plus originales proposée par les économistes Post-Keynésiens est celle de l’Employeur en Dernier Ressort (EDR), proposée par Minsky en 1986. Il s’agit de la création d’emplois dans les secteurs à bas salaires permettant de satisfaire des besoins non satisfaits (crèches, aménagements d’espaces publics,…). Cette politique d’EDR permet de soutenir la demande d’éviter l’usure du capital humain et de servir d’ancrage pour la fixation d’un salaire minimum.
- LA QUESTION DU DEVELOPPEMENT (Chapitres 22 et 23)
Les économistes Post-Keynésiens se situent entre les Néo-Classiques qui voient dans la croissance le remède à tous les problèmes et les perspectives écologiques qui en font la cause de tous les maux mais ils rejettent l’optique de la substituabilité des capitaux ainsi que la soutenabilité faible. Enfin, ils prônent un retour de l’Etat à travers la planification indicative. Le « nouveau développementisme » soutenu par les Post-Keynésiens veut rompre avec l’optique libérale dominante depuis les années 70 (cf Robinson) et renouer avec le « développementisme classique » (Marx, théorie structuraliste théorie de la dépendance). Il veut favoriser le financement interne du développement économique et neutraliser la tendance à la surévaluation des taux de change consécutive à l’ouverture sur l’extérieur (et l’entrée de capitaux étrangers) et favoriser à la fois un « Etat fort » et un « marché fort ».
- LA MICRO ECONOMIE POST-KEYNÉSIENNE (Chapitre 16)
Dans la lignée de Keynes, l’approche se présente comme absolument macro économique. Pourtant il existerait une microéconomie Post-Keynésiens que nous présentent Dallery et Melmiès. Ils se situent dans le cadre de la concurrence imparfaite (Robinson) et du degré de monopolisation (Kalecki). Nous ne sommes pas dans une optique de « price taker » mais de « cost plus prizing » (le prix est obtenu par l’ajout d’une marge au coût). Pour ce qui est de la stratégie de l’entreprise, les Post-Keynésiens se divisent en deux courants : celui de la maximisation du profit (Robinson, Kalecki) où on recherche le point où la recette marginale (et non le prix) égalise le coût marginal, et celui de la maximisation des ventes : dans ce dernier cas, on fixe un « profit cible » qui draine suffisamment de ressources pour pouvoir financer l’accroissement des ventes. Ici le prix n’est donc pas la seule variable d’ajustement et l’entrepreneur devient un véritable acteur qui prend des risques et innove. Pour les Post-Keynésiens, la concurrence n’entraine pas une baisse des prix (comme le pensent les Néo-Classiques) mais elle pousse les entreprises à comprimer leurs coûts par la baisse des salaires.
- REPRESENTATIONS ECONOMIQUES ET MODELES POST-KEYNÉSIENS (Chapitres 7, 14, 15)
Frédéric Poulon (chapitre 7) rappelle les bases du circuit keynésien qui apparait dans les années 1930 avant de connaitre une éclipse dans les années 70 et réapparaitre dans les années 80. Son apport essentiel est d’intégrer les délais dans le fonctionnement économique. Toutefois, il faut éviter d’adopter la perspective du keynésianisme « hydraulique » qui tend à gommer l’importance de l’incertitude radicale. Les chapitres 14 et 15 abordent des représentations assez complexes des modèles Post-Keynésiens. Dans les années 2000, les Post-Keynésiens développent des modèles « SFC » (stocks-flux cohérents). Les modèles Néo-Classiques présentent des économies fictives avec des agents homogènes, sans monnaie sans effets de stocks et avec une unique régulation par les prix. Les modèles SFC intègrent le temps historique, des facteurs monétaires et financiers, une monnaie endogène ainsi qu’une cohérence « flux-stocks ». Les auteurs proposent d’allier ces modèles SFC avec des modèles ABM (« Agent Based Model »). Ceux-ci se développent vraiment dans les années 1990. Ce sont des modèles qui comprennent des agents hétérogènes dont les interactions font émerger des phénomènes macroéconomiques. Il n’y a pas de recherche d’optimisation mais un recours à la rationalité procédurale dans la lignée d’Herbert Simon.
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