BERGER Peter – LUCKMANN Thomas : LA CONSTRUCTION SOCIALE DE LA REALITE – 1986 - Meridiens Klincksieck- 1ère éd. 1966 )

LA CONSTRUCTION SOCIALE DE LA REALITE  

BERGER Peter – LUCKMANN Thomas

1986 - Meridiens Klincksieck- 1ère éd. 1966 )

          

  Pour les auteurs, le problème de la sociologie de la connaissance est au centre de l’analyse sociologique. Il s’agit pour eux de comprendre ce domaine existant entre les connaissances de l’homme de la rue pour qui le fait de savoir « que les choses sont ainsi » suffit pour mener à bien ses activités quotidiennes et la démarche du philosophe pour qui rien n’est acquis. Il convient donc de comprendre comment se construit le savoir quotidien de l’homme de la rue et comment se construit la réalité empirique.

Mais pour cela, les auteurs se démarquent aussi bien des sociologismes que des psychologismes. Influencés par Alfred Schutz, Marx et Durkheim, ils envisagent de dépasser l’objectivisme de Durkheim et le subjectivisme de Weber et se situent dans la tradition de l'interactionnisme symbolique et de la phénoménologie. Il s’agit donc d’analyser la société à la fois comme réalité intersubjective et réalité objective.

 

La réalité de la vie quotidienne se partage entre divers « mondes » (monde du travail, de la famille,…) et est d’emblée intersubjective. Cette intersubjectivité se construira dans l’interaction sociale. A mesure que les interactions se répèteront entre deux individus se développera une stabilisation des attentes de rôle, une « typification ». Dès lors, qu’un troisième intervenant s’intègre dans l’interaction, on passe à une objectivation de la typification (en termes simples, on passe du « on recommence de la même manière » à « c’est comme cela que les choses se passent »). Cette objectivation constitue un début d’institutionnalisation.

La société comme réalité objective sera alors obtenue par l’institutionnalisation des interactions et par leur transmission intergénérationnelle.

La légitimation des institutions se fera par degrés de complexité croissants. L’utilisation du langage, en imposant ses codes et en constituant un stock de connaissances commun à tous, constitue un premier degré ; puis on passera à des propositions théoriques rudimentaires (maximes, proverbes,…), à des théories spécialisées (économie, Droit,…) et enfin à des « Univers Symboliques ». Avec ces derniers, on aboutit au terme de l’objectivation de la Société qui apparait alors comme extérieure à l’homme.

Mais ces univers symboliques doivent être soutenus par des appareils conceptuels que sont els mythes, théologies, philosophies et sciences.

Ces univers symboliques permettent de légitimer à la fois la biographie individuelle et l’ordre institutionnel mais il peut y avoir par moments des mouvements de « désinstitutionalisation » et de croissance de la subjectivation.

 

La société va aussi apparaitre comme « réalité subjective », ce qui passe par les processus de socialisation primaire et secondaire. La socialisation sera considérée comme réussie lorsqu’il y a symétrie entre la « réalité objective » et la « réalité subjective ». Cet objectif sera aisément atteint dans les sociétés simples à faible division du travail où l’individu distinguera difficilement son « Moi interne » et son « Moi social ». Dans ces sociétés simples, une socialisation ratée sera le fait « d’accidents » biologiques ou sociaux (handicap physique, pauvreté,…). En revanche, la socialisation sera beaucoup plus difficile à atteindre dans le cas des sociétés complexes où coexistent les mondes « différents » et les différentes définitions de la société. Dans ce cas, la socialisation ratée sera le fait des différences entre les mondes (conflits de rôles par exemple,…). L’individualisme et la conscience de la relativité seraient les conséquences de cette « socialisation ratée », l’individualisme résultant du sentiment de différence entre le moi interne » et le « moi social » et la conscience de la relativité de la confrontation de mondes différents.

 

On retrouve alors les trois pôles du monde social : la société est une production humaine (extériorisation) ainsi qu’une réalité objective et l’homme est un produit social (intériorisation).

Ajouter un commentaire