LE PROBLÈME DES GÉNÉRATIONS

Karl MANNHEIM : LE PROBLÈME DES GÉNÉRATIONS - Nathan – 1990

Dans cet ouvrage publié pour la première fois en Allemagne en 1928, Mannheim rejette les conceptions « objectives «  de la génération avec lesquelles on pourrait fixer des frontières de l’ext »rieur. Il reprend la notion d’entéléchie, empruntée à Pinder, désignant le fait que des individus contemporains sont soumis pendant leurs années de réceptivité aux mêmes stimulis extérieurs. Il analyse donc le problème des générations de façon assez homologue à l’analyse des classes sociales. La situation de génération ne peut aboutir à un ensemble générationnel que lorsque des contenus réels, sociaux et intellectuels, établissent un lien entre individus qui sont dans la même situation de génération. Cet ensemble générationnel suppose des « impulsions de génération » liées au rythme de la vie sociale. Cela n’empêche cependant pas cet ensemble générationnel d’être composé de « sous groupes » (« unités de génération ») ayant des attitudes différentes ; ainsi, de jeunes paysans et de jeunes étudiants n’appartiendront pas à la même génération et le monde paysan connait, en, de moindres phénomènes de génération. L’apparition de nouvelles générations permet d’ouvrir régulièrement le champ des possibles et s’il y a des oppositions au sein de chaque génération la polarisation de ces oppositions change d’une génération à l’autre. Il ya toutefois une influence réciproque entre les générations. Enfin, « l’esprit du temps » n’est pas nécessairement celui d’une génération mais celui d’une couche sociale qui a , à un moment donné, une importance particulière. Donc l’effet de génération ne peut pas se comprendre directement mais seulement dans son « devenir historique ».

            La notion d’entéléchie empruntée à Pinder est à rapprocher des notions d’habitus, de mentalité et d’idéologie. Cependant, comment déterminer les évènements extérieurs pertinents pour l’impulsion de génération ? L’analyse se complique dans la mesure où une même génération comprend autant d’unités (de sous groupes par âge, sexe, classe sociale,…) qui réagiront différemment à un même évènement en fonction de leur habitus.