William (Bill) Foot WHYTE - STREET CORNER SOCIETY – 1996 – Ed La Découverte – 1ère Ed. Américaine 1943

STREET CORNER SOCIETY

– William (Bill) Foot WHYTE

-1996 – Ed La Découverte – 1ère Ed. Américaine 1943

L’auteur s’est installé dans « Norton Street » (qu’il nomme « Cornerville »), un quartier de Boston afin d’effectuer un travail d’observation participante à partir de 1937 et pour une durée de tris ans et demi. Le quartier est marqué par de multiples clivages : le principal est celui qui oppose les jeunes dont els familles sont originaires d’Irlande à ceux originaires d’Italie. Mais il ya également des clivages au sein du groupe des italiens, clivages autour de leur paesani (communauté constituée autour de leur ville d’origine), rupture entre italiens du nord et italiens du Sud, ainsi qu’entre la première et la deuxième génération d’italiens. Enfin, chez les jeunes il ya rupture entre les corners boys » (les « gars de la rue ») et les « College boys » (jeunes en ascension sociale)

Les bandes

Bill Foot Whyte va réussir à être accepté dans la bande de Doc (« Norton club»), un jeune italien « corner boy ». Les bandes sont organisées en classes d’âge et se battent fréquemment entre elles bien qu’il n’y ait jamais de sang versé. La bande de Doc est nettement hiérarchisée et les meneurs sont reconnus par leur capacité à manier le langage et leur habileté à la bagarre. Le Bowling tient une place importante dans la vie de la bande : lieu de convivialité et de compétition et dont les résultats déterminent en partie la hiérarchie dans le groupe. La bande de Doc commencera à péricliter quand celui-ci sera poussé à se présenter aux élections locales et n’ira pas jusqu’au bout. Bill rencontrera par la suite Chick Morelli, un autre italien ; celui-ci a la volonté de s’élever socialement et de réussir politiquement, par intérêt personnel mais aussi pour valoriser la communauté italienne. Il réussit à entrer au collège Saint Patrick et sera le premier italien à pouvoir entrer à l’université de Ivy (Harvard). En 1937, il créé le CCI (« Club de la Communauté Italienne ») qui a pour objectif de créer des liens avec des intellectuels non italiens de façon permettre la promotion sociale des membres du club et de Cornerville. Mais le club est tenaillé par els tensions entre les « college boys » (étudiants) et les « gars de la rue » et finit par éclater. Il faut ajouter l’existence du « foyer socio-culturel » qui accueille tous les garçons du quartier mais qui, en imposant les normes de la classe moyenne, finit par durcir les clivages entre les gars de la rue et les étudiants. La mobilité sociale des étudiants fut beaucoup plus forte que celle des « gars de la rue » ce qui s’explique par leur réussite scolaire mais aussi, selon l’auteur, par un ensemble de valeurs (ethos) différent : les étudiants vivent dans une économie d’épargne et d’investissement alors que les gars de la rue vivent dans une économie de dépense marquée par des obligations mutuelles dans le groupe. De plus, les étudiants se jugent mutuellement en fonction de leur réussite scolaire alors que les gars de la rue accordent plus d’importance sur leur fidélité en amitié. Bill s’intéressera ensuite au CSAC (« Club Social et Athlétique de Cornerville »), club qui regroupe deux bandes, la bande du coiffeur et la bande du resto, facilement en opposition et leurs leaders Tony et Carlo. Il apparait que Carlo va prendre peu à peu l direction de la bande. Tony et Carlo dispose de sources de pouvoir différentes : Tony a des activités extérieures et de nombreuses relations extérieures au club. Carl est un gars de la rue et n’assume son contrôle qu’au sein du club. Tant que le club était divis »é entre la bande du resto et la bande du coiffeur, Tony avait le dessus mais dès lors que les clans se sont rapprochés c’est Carlo qui s’est mis à dominer.

Le racket

Le racket apparait avec la prohibition puis, après la fin de celle ci, avec les jeux et notamment les « loteries ». La loterie, si elle est illégale, n’est pas considérée comme non légitime par la population italienne qui voient dans le jeu une mesure de leurs propres capacités. Le racket de la loterie implique une forte organisation strictement hiérarchisée. Au premier niveau on trouve les « collecteurs » chargés de prélever les enjeux et de remettre les gains. Ils doivent remettre les enjeux au syndicat ou à un intermédiaire (« l’homme à 50% ») et peuvent faire des emprunts de lui s’ils ne sont pas en mesure de remettre les gains qu’ils doivent. Le syndicat est composé de 10 à 12 membres et a pour rôle de répartir les zones de chacun (pratique de cartel), d’établir les rapports des numéros gagnants et d’éliminer la concurrence extérieure. La police assume un rôle ambigu mais fonctionnel dans la vie du quartier. Les liens avec le syndicat peuvent être étroits (« pots de vin ») ainsi qu’avec les commerçants qui peuvent leur faire des cadeaux pour s’assurer un soutien. Avec les habitants du quartier, les relations sont également ambigües dans la mesure où, souvent, racketteur et policier ont vécu enfants dans le même quartier ; de plus, le jeu est une activité illégale sans véritable victime (il est rare qu’un perdant porte plainte). Dans la vie quotidienne, le policier veille donc à ce que l’activité de jeux se déroule sans heurts et sans débordements car elle est un élément de régulation de la vie sociale. Cependant, il arrive que la police intervienne contre l’activité de jeux soit pour neutraliser le concurrent d’un racketteur local soit, après un évènement spectaculaire, pour montrer aux citoyens que la police fait son travail. La police se troue donc facilement dans une contradiction de fonctions, entre la nécessité d’obtenir la confiance des habitants du quartier afin de réguler la vie sociale et l’application de la Loi pour répondre aux demandes implicites de la classe moyenne. Le racketteur a un rôle social dans le quartier : il assure le maintien de liens sociaux dans le quartier en permettant de faire des jeux dans divers magasins, en favorisant la dépense issue des gains de jeu voire en fournissant des capitaux aux entreprises nouvelles. La vie sociale du quartier est donc en partie la résultante d’un jeu » entre la police, els racketteurs et les commerçants.

La politique

Au début du XXème siècle, le « club de Cleveland », proche de la communauté irlandaise, contrôlait les votes par sa capacité à fournir des emplois dans le secteur public ou privé. Mais son pouvoir va s’effriter dans les années parce que la mobilité géographique rend l’électeur moins captif (c’est toutefois moins vrai pour corner street) , que les italiens sont de moins en moins minoritaires dans le quartier et ne sont donc plus obligés de faire allégeance au club et , qu’enfin, le Ne Deal, en accordant des aides, brise ce monopole que s’était octroyé le club. Le système se transforme mais ne disparait pas pour autant car les racketteurs occupent une place croissante dans le contrôle des votes, les hommes politiques sont donc obligés de composer avec eux. Les différents « clubs » (en général composés de plusieurs bandes) cherchent à faire élire leur patron lequel agira ensuite dans l’intérêt des membres du club. Cependant, l’homme politique doit aussi tenir l’appui de « gros bonnets » (hommes d’affaires, racketteurs,…) et il est pris dans une contradiction entre les intérêts des électeurs de Cornerville et ceux de ses financiers. De même, le politique devra se référer à la démocratie américaine et, dans le même temps, appuyer ses discours de meetings sur les appartenances ethniques, religieuses ou de classe. La manipulation des votes passera ensuite le jour des élections par des discours de persuasion faits à l’entrée du bureau de vote, le fait d’accompagner les électeurs au bureau de vote et la pratique de la fraude (électeurs hors quartier, fictifs,…).

Conclusion

Bill Foot Whyte insiste sur le rôle central de la bande qui se constitue dès la petite enfance et se maintien jusqu’à la trentaine. Les types sont perdus en dehors de la bande, qui a plus d’importance que la famille, et y trouvent une forme de stabilité produite par les interactions et les obligations mutuelles. Le chef de la bande est celui qui excelle dans toutes les activités de la bande et qui a de nombreuses relations extérieures mais il appuie aussi son leadership par le fait qu’il dépense beaucoup pour les autres membres de la bande (beaucoup plus qu’il ne reçoit d’eux). Le cas de Doc est d’ailleurs intéressant puisqu’il souffrait de maux de tête et de vertiges chaque fois qu’il était sans emploi : Whyte explique cela par le f ait que l’absence de travail ne permettait pas à Doc de faire ses dépenses de chef et d’assoir son statut. Le travail de Bill Foot Whyte est souvent présenté comme typique des recherches de l’Ecole de Chicago. Si la pratique du travail de terrain et de l’observation participante le rapproche de celle-ci, en revanche il s’en éloigne par le fait qu’il ne retient pas l’idée de « désorganisation sociale » du quartier. Au contraire, l’apport essentiel de sa recherche est de montrer que les liens entre les bandes, le racket, la police, les commerçants et les politiques sont fonctionnels et que la déviance assure un rôle régulateur. En revanche, ce mode d’organisation sociale n’est pas adapté au mode d’organisation sociale global de la société américaine.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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