RADICALITES

(Intervention pour la préparation aux concours IEP)

  • RADICAL, RADICALITES : DE QUOI PARLE-T-ON ?

Aujourd’hui on associe spontanément « radicalité » à djiadhisme ou à terrorisme… Le terme recouvre une réalité beaucoup plus large que ça. On use des termes « radical », radicalité, radicalisme et radicalisation. Que signifient-ils ? Le terme « radical » vient de « racines ». Cela désigne ce qui est relatif à la racine ou à l’essence de quelque chose ; qui concerne le principe premier de quelque chose. Par extension, ce qui est complet, absolu, qui ne supporte aucune atténuation. De là, on a assimilé le terme à ce qui ne peut admettre aucune exception puis à l’extrémisme. « Radicalité » est le substantif relatif à ce qui est « radical » « Radicalisation » désigne le fait de passer d’une position non radicale à une position radicale, donc d’une position qui supporte le compromis à une position sans compromission. « Déradicalisation » : Presque inexistant dans la presse dans les années 1990, le mot apparait à partir des années 2000. Il faut garder à l’esprit que les termes « radical » et « radicalités » ne sont pas des termes péjoratifs à l’origine. La radicalité peut concerner le domaine de la pensée, des idées ou de l’opinion mais également le domaine de l’action.: dans le cadre de la pensée on peut s’intéresser au radicalisme épistémique. Ce radicalisme peut concerner également les discours, les thèses,…de tous niveaux, bref la « pensée commune » Donc avant de parler de « radicalisation » en renvoyant à des actions terroristes, il convient d’aborder la question de la radicalité dans e domaine de la pensée et des opinions

  • EXEMPLES DE RADICALITES

Les options radicales supposent donc de reprendre les choses « à la racine » c’est-à-dire d’opérer des transformations profondes. Il y a généralement une proximité avec l’idée « d’extrême ». La notion de radicalité en politique apparait véritablement au 18è siècle avec des volontés de transformation profonde de la société. Il y a ainsi eu un « radicalisme républicain » qui proposait de revenir aux sources révolutionnaires et qui proposait d’en revenir aux sources révolutionnaires. En 1901 est créé le « parti radical » à l’origine des lois sur la laïcité, de l’instauration de l’impôt sur le revenu. Ces réformes correspondent à des réalités aujourd’hui communes ont été perçues comme « radicales » et , aujourd’hui, le « parti radical » est un minuscule parti se situant au centre de l’échiquier politique (et qui n’est plus du tout radical). L’idée de « radicalisme » renvoie donc à des positions extrêmes, à des options de bouleversement. Il peut donc y avoir un radicalisme de gauche et un radicalisme de droite s’assimilant à l’extrême gauche et à l’extrême droite. De même certaines formes de pensée liées à l’écologie ou à la préservation de la terre peuvent être qualifiées de « radicales » (certaines théories de la décroissance, els thèses liées à Gaïa, l’assimilation des animaux à des êtres égaux aux hommes, (…). On perçoit également l’existence d’un radicalisme religieux qu’on peut assimiler à des positions fondamentalistes, absolutistes ou extrémistes. On peut donc considérer que l’opinion ou la pensée radicale peuvent renvoyer aux idées « d’extrémisme », de « volonté de transformation profonde » mais aussi à l’idée qu’il ne peut y avoir de compromis avec d’autres pensées ou prises de position. Ca renvoie donc aussi à un profil psychologique particulier.

  • LA PENSEE EXTRÊME (Bronner)

Le profil des radicalisés a été particulièrement étudié par le sociologue Gerald Bronner dans son libre « La pensée extrême ». Ce qui caractérise, d’après lui, la « pensée extrême », c’est d’abord son « inconditionnalité » c’est-à-dire le refus des circonstances atténuantes, des nuances et du compromis. Cette « inconditionnalité » peut caractériser toute pensée : ainsi, nous pouvons avoir un avis conditionnel sur le vol : nous condamnons le vol mais pouvons le comprendre en cas d’extrême nécessité. En revanche la plupart d’entre nous condamnons la torture qu’elles qu’en soient les circonstances ; il s’agit d’un avis inconditionnel. La pensée extrême ou radicale dans le cadre de la politique ou de l’écologie relèvera donc de cette inconditionnalité sur de points où les « non radicaux » sont prêts à faire des compromis. Mais dès qu’une pensée est inconditionnelle, on court le risque qu’elle devienne déraisonnable. Gerald Bronner va donc s’intéresser à cette pensée extrême dans des cas où elle apparait clairement comme celui de croyances non fondées (ce qu’on retrouve aisément dans les sectes, par exemple). On pourrait penser a priori que les extrémistes, les inconditionnels ou les radicaux sont des fous, des déshérités ou des personnes n’ayant pas des capacités intellectuelles suffisantes pour se livrer à une saine analyse. C’est la réaction la plus fréquente du grand public. En fait, Bronner montre que dans bien des cas, notamment ceux des terroristes, les individus ne sont ni relégués socialement, ni ignorants ni illuminés. Il pense que leur radicalité doit être analysée dans le cadre d’une pensée rationnelle. Gerald Bronner se situe dans la lignée de l’Individualisme méthodologique de Raymond Boudon c’est à dire qu’il pense qu’on doit analyser les individus comme capables d’autonomie et qu’on ne les conçoit pas comme soumis à une illusion venue de l’extérieur (d’un groupe, d’un milieu social, ,…) même si l’influence du groupe peut évidemment compter. Cependant l’IM de Boudon (et des sociologues en général) n’est pas à confondre avec l’IM des économistes NC : pour ces derniers, l’individu est parfaitement rationnel et utilise au mieux toute l’information disponible. L’IM de Bronner appartient à ce qu’on appelle la « sociologie cognitive » c’est-à-dire qu’on considère que l’individu est soumis à des biais de raisonnement : il n’est pas parfaitement rationnel mais peut faire des erreurs d’analyse liées à ses émotions, aux valeurs qu’il défend ou à la difficulté qu’il y a à récupérer et analyser toute l’information disponible (« biais cognitifs »). Cette pensée extrême peut, dans certains cas, amener à un « comportement extrême » c’est-à-dire la capacité à sacrifier ce qu’on a de plus précieux au nom d’une vie (antithèse « mourir pour des idées » de Brassens). Beaucoup d’idées qui peuvent être radicales peuvent faire l’objet de discussions : extrémisme de gauche ou droite, « précautionnisme », …mais Bronner va s’intéresser aussi aux idées indiscutablement délirantes : croyances dans le monstre du Loch-Ness, certitude que 78 vierges attendent au paradis, capacité du gourou à léviter, … qui sont aussi, en leur genre, des idées radicales. Comment expliquer ces croyances délirantes de la part d’hommes « qui ne sont pas fous » ?

+ Il présente d’abord la thèse des marches de l’escalier : le « croyant » va d’abord admettre des idées plausibles et défendables puis il va peu à peu, accepter des idées de moins en moins rationnelles, chaque croyance étant justifiée par la croyance précédente. C’est un phénomène qu’on peut rencontrer couramment (cas du génétisme, ou puisqu’un clone est normalement physiquement identique à l’individu de départ, pourquoi ne le serait-il pas psychologiquement,… ? Au 19è siècle on justifiait la réalité du spiritisme par l’idée que si le télégraphe permet de contacter des gens à distance, pourquoi ne pourrait-on pas contacter des morts ?)

+ Biais de confirmation : le croyant va ensuite renforcer sa croyance par le « biais de confirmation ». C’est une erreur que nous faisons tous. Quand nous défendons une idée ou une thèse, normalement nous devons chercher des faits qui infirment notre thèse et nous la considèrerons comme valide tant que nous ne trouverons pas de faits contraires. Or dans la vie courante, nous faisons exactement le contraire, nous cherchons des faits qui confirment notre thèse (par exemple, si je crois que les noirs ont le sens du rythme, je présenterai le cas de noirs qui l’ont effectivement alors qu’une démarche rationnelle consisterait à chercher des noirs qui ne l’ont pas). On n’aura donc pas de mal à trouver des exemples qui confirment ce à quoi on croit.

Ce biais sera renforcé dans le cas d’Internet qui permet de trouver encore plus facilement des faits confirmatifs. De plus, Internet fabrique des « bulles conversationnelles » c’est-à-dire qu’il vous propose des pages sur la base de ce que vous avez déjà cherché. Donc si vous avez fait une recherche sur le monstre du Loch Ness, Internet vous proposera en priorité des pages portant sur le monstre du Loch Ness.

+ Cependant, le croyant peut trouver sur Internet aussi bien des pages confirmant qu’infirmant sa croyance. En réalité, il trouvera plus de pages la confirmant car les partisans des thèses minoritaires sont plus « activistes » sur la toile que ceux qui défendent les thèses majoritaires (et reconnues). Celui qui ne croit pas à cette thèse ne sera sans doute pas influencé mais celui qui y croit verra ses croyances renforcées et cela touchera surtout les indécis.

+ Théorie du complot Dans un certain nombre de cas, les croyances radicales s’accompagnent de théories du complot. On appelle « théories du complot » les thèses selon lesquelles la « vérité » est cachée aux yeux du commun des mortels (d’où la résurgence actuelle du mythe des illuminatis). Attention à ne pas simplifier ces iodées : le fait qu’il y ait des théories du complot ne veut pas dire que les complots n’existent pas. Les complots existent mais les théories du complot prétendent qu’ils sont omniprésents et qu’ils structurent le monde. Par ailleurs, si les théories du complot viennent toujours de pensées radicales, il ne faut pas en conclure que toute pensée radicale amène au complot (ce serait faire une erreur cognitive classique qu’on appelle « biais de symétrie »).

+ Dissonance cognitive Les croyances sont d’autant plus solidement implantées qu’elles sont souvent insensibles à la réfutation Il s’agit là de ce qu’on appelle la « réduction de la dissonance cognitive » qui est un biais très fréquent chez tout le monde mais qui prend des proportions énormes dans le cas des pensées extrêmes. La disssonance cognitive désigne le fait que l’individu percevra deux résultats apparemment incompatibles dans son système de croyance. La contradiction étant désagréable, plutôt qu’abandonner la croyance, il préfèrera trouver une explication renforçant sa croyance. Cette idée a été développée par le psychologue Herder dans les années 50 qui avait infiltré une secte millénariste, sous la conduite de madame Keech, qui croyait à une fin du monde programmée par des extraterrestres. Mme Keech avait donné une date à cette fin du monde et la secte s’enferma dans un bunker. Quand ils s’aperçurent qu’il n’y eut pas de fin du monde, certains abandonnèrent leur croyance. Mais d’autres préférèrent penser que c’était leur action et leurs prières qui avaient fait que les ET renoncèrent à leur projet. On voit qu’ici on préfère transformer un des éléments de la réalité plutôt qu’abandonner sa croyance. On a ici l’amplification d’un phénomène courant. Par exemple, prenons le cas d’un étudiant qui s’estime intelligent et avoir suffisamment travaillé pour un devoir et qui échoue. Il y a dissonance entre l’image qu’il a de lui-même et les résultats qu’il obtient. Il peut alors remettre en cause ses capacités ou son travail mais il peut aussi formuler l’hypothèse que le professeur ne l’aime pas et l’a saqué. C’est un moyen de défense que nous utilisons tous quotidiennement sans que cela pose forcément de problèmes. Mais transposé à une croyance politique ou religieuse inconditionnelle, ça peut avoir des conséquences désastreuses. Cela explique aussi pourquoi des croyants inconditionnels mettent parfois des années à quitte un groupe (c’est valable pour une secte, mais on peut transposer cette idée aux cas des militants qui ont mis des années à quitter le PC).

+ Confort du groupe Il faut ajouter à cela que dans le cas où le croyant rejoint un groupe, celui-ci lui fournit une sorte de « confort intellectuel » qu’il est difficile de quitter et cela, en plus, renforce la croyance.

+ Coupure volontaire avec le monde Le croyant, ayant des idées extrêmes en contradiction avec les idées de ceux avec qui il vit (parents, amis,…) va ressentir le monde comme inconfortable. Il n’est donc pas impossible qu’il préfère couper avec « son monde d’avant ».

+ Coupure opérée par le groupe d’appartenance. Il est également possible, dans les cas extrêmes, que le nouveau groupe d’appartenance incite l’individu à couper avec son environnement. Eventuellement ça peut être le fait d’une personne seule (cas du « gourou » de Bordeaux qui a coupé une famille entière du reste du monde. On voit que dans l’optique de Bronner, il n’est nul besoin d’avoir recours à des explications extrêmes (folie, illusion, irrationalité,…) pour expliquer des idées et/ou des comportements extrêmes. Ces derniers s’expliqueront par l’extrémisation de réactions ou de comportements que nous avons tous.

L’ « extrémiste » applique l’inconditionnalité d’une opinion à une grande part de ses opinions alors que le « non extrémiste» ne le fait que dans de rares cas. Il arrive au « non extrémiste » de croire à une idée pour ne pas remettre en cause la croyance précédente mais, souvent, il est capable de faire marche arrière. Tous les hommes ont tendance à chercher des exemples qui confirment leur opinion, l’« extrémiste » le fera presque systématiquement. Il peut exister des complots ou des « forces cachées » dans des cas spécifiques, l’extrémiste en fera une Loi. Tout un chacun trouve des excuses à ses contradictions mais il lui arrivera d’abandonner une croyance erronée si elle est invalidée ; l’extrémiste ne le fera pas (ou plus difficilement)., etc…

 Conclusion Rappelons qu’il ne faut pas faire d’amalgames. Si les « extrémistes » sont radicaux, la pensée radicale ne mène pas nécessairement aux comportements extrêmes que nous avons abordés n’est pas nécessairement extrême

  • PROFILS SOCIOLOGIQUES DE RADICALISES ACTUELS

L’enquête de Galland et Muxel : Olivier Galland et Anne Muxel ont entrepris une enquête, dévoilée en Avril 2017, sur la radicalité chez les jeunes. Mais il ne s’agit pas ici d’interroger de jeunes djihadistes ; l’enquête a porté sur un échantillon de 7000 lycéens sur leur attitude ou leurs opinions à l’égard des comportements radicaux. Il s’agit de repérer les degrés entre la tolérance à l’égard de la violence radicale et son refus absolu avec les intermédiaires possibles. Il ne s’agit donc pas, comme dans les travaux de Roy ou Keppel, de chercher à dégager la logique d’accession aux comportements terroristes. L’enquête porte sur des lycéens de 21 lycées de quatre académies (Lille, Créteil, Dijon, Marseille). L’échantillon n’est pas représentatif de la population française pour pouvoir faire des analyses fines sur la population qui les intéresse le plus (les jeunes musulmans) mais les résultats sont comparés à un échantillon témoin représentatif de la France entière. Ils notent la présence d’un net effet religieux, c’est-à-dire que les jeunes musulmans sont trois fois plus nombreux que la moyenne à défendre une vision absolutiste de la religion (il n’existe qu’une seule religion vraie, la religion explique mieux la création du monde que la science) cependant leur pratique religieuse est épisodique et peu structurée et leur rapport aux normes sociales et au « libéralisme culturel » est ambivalent. En revanche, l’explication par la précarité économique ne semble pas validée mais le sentiment d’être discriminé est deux fois plus fort que pour la moyenne Les jeunes musulmans semblent plus marqués par une radicalité politique que la moyenne mais il faut bien indiquer que ceux qui sont attirés par la radicalité constituent une minorité parmi les jeunes musulmans.

  • L’enquête de Scott Atran : Evidemment la question des radicalités soulève le problème des « radicalisés » les plus en vue en ce moment c’est-à-dire toutes ces personnes qui rejoignent Daech et qui sont radicaux dans leur mode de pensée (il n’y a pas de compromis possible avec leurs valeurs), leurs opinions (qui sont extrêmes) et leur comportement (ils se coupent de leur monde premier en quittant la France, ils sont prêts à sacrifier les autres et eux-mêmes au nom de leur cause). Il faut voir qu’on peut parler des djihadistes aujourd’hui mais qu’on aurait pu parler des brigades rouges ou de la Bande à Baader dans les années 1970. Aussi intéressante que soit l’approche de Bronner, celle-ci permet de comprendre le cheminement du radicalisé mais permet mal de comprendre pourquoi la radicalisation a touché tel individu et pas un autre.

La première chose à faire est de voir s’il est possible de dresser un « portrait type » du radicalisé. Ce « portrait type » ne peut qu’être partiel et provisoire. D’après l’anthropologue Scott Atran, ce sont approximativement cinq à six mille personnes sont parties d'Europe, la plupart venant de France, d'Allemagne ou de Grande Bretagne. Il s’agit de jeunes (le groupe qui a la plus forte progression est celui des 12-17 ans) et surtout des hommes (même si le rôle des femmes n’est pas à négliger dans leur participation aux réseaux) Socialement, ils ont connu l’intervention des services sociaux ; leur scolarité les dirige vers les filières techniques et professionnelles.  Cette relégation scolaire trouve parfois une compensation dans des sociabilités de rue (le monde des bandes) et les pe­tits désordres qui les accompagnent. Mais toutes ces caractéristiques ne leur sont pas propres, elles correspondent à la majorité des enfants « des cités » dont l’immense majorité ne se dirige pas vers ces formes d’extrémisme (ce qui ne veut pas dire que ces caractéristiques ne sont pas à prendre en compte pour comprendre leur comportement). Les djihadistes sont pour l’essentiel des enfants de la deuxième génération d’immigrés (on ne retrouve ni la première ni la troisième génération) pour 70% et on trouve des convertis pour 25% environ. L’identité religieuse semble compter moins qu’on pourrait l’imaginer. Les djihadistes ont un faible taux d’éducation religieuse, ils vont peu à la mosquée et ne suivent pas le ramadan. L’adhésion à l’Islam se serait faite soit par quelques imams marginaux, soit par un groupe de copains, soit par Internet. Olivier Roy considère significatif le fait qu’il y ait souvent des fratries concernées par ce djihadisme. Si la culture religieuse ne semble donc pas déterminante, en revanche, l’identité nationale (ou du moins son absence comme le fait de ne pas se sentir britannique) et le sentiment d’être rejeté de la communauté d’accueil semble déterminante.

  • THESES SUR LE DJIADHISME ACTUEL

Trois thèses essentielles.

Pour François Burgat, cette radicalisation relève d’une lecture tiers-mondiste de la situation : les actes terroristes seraient une réponse au néo-colonialisme actuel. L’idée est que les pays en voie de développement et notamment les pays musulmans sont économiquement et politiquement dominés ar l’Occident.

Pour Gilles Kepel, il faut chercher l’explication dans une lecture extrême de l’Islam, le salafisme.

Enfin pour Olivier Roy aucune des deux thèses précédentes ne tient. Les djihadistes sur lesquels il a enquêté ne semblent pas avoir une conscience relative à la situation de la colonisation et il met l’accent sur le fait que les djihadistes n’ont qu’une faible connaissance de l’islam en tant que religion. En revanche, il remarque qu’ils sont soit issus de la seconde génération soit ce sont des convertis. Il s’agit donc pour lui de jeunes mal insérés dans la société et pour lesquels la transmission de l’islam par leurs parents ne s’est pas vraiment faite. Ils leur opposent donc un « islam » qu’ils pensent plus pur et qui les met en marge de la communauté musulmane. En ce sens, il s’agit d’abord du désarroi d’une génération particulière et leur situation est semblable à elle des tueurs de masse de columbine ou à celle des brigades rouges autrefois. S’ils ont choisi l’islam c’est parceque c’est le récit le plus attirant actuellement sur le « marché de l’idéologie ». Le discours islamiste leur offre une histoire pleine de héros et de sacrifices. Pour Olivier Roy, il n’y a pas de radicalisation de l’islam mais une « islamisation de la radicalité ».

 

LA QUESTION DE LA « DERADICALISATION »

Le problème actuel est de savoir commet faire en sorte que des personnes « radicalisées » abandonnent leur positionnement actuel (c’est la « déradicalisation ») ou comment faire pour qu’il n’y ait pas de nouveaux radicalisés. Le premier cas a amené à l’ouverture de « centres de déradicalisation » (notamment en Indre et Loire) dont l’expérience fut trop courte pour qu’on puisse en tirer des enseignements (mais ça pose un problème de fond qui est celui de savoir qu’elle est notre légitimité d’agir sur les opinions d’autrui). On sait que l’accès à la radicalisation des radicalisés actuels n’a pas é té essentiellement le fait d’Imams radicaux (même s’ils existent) mais du poids des réseaux de proximité (amicaux et c’est là qu’n voit l’importance des fratries) et surtout le rôle d’internet. Dans la « démocratie des crédules » Gerald Bronner a mis l’accent sur le fait que les caractéristiques d’internet pouvaient amplifier les « pensées extrêmes » (bulles conversationnelles, bisais de confirmation, activisme, etc…). Donc la question essentielle est celle de l’éducation et de la maitrise de l’information des idées diffusées sur Internet.

Mais ça ne veut pas dire que toute pensée radicale ou extrême est interdite

 

RAPPELS AUX ELEVES DES PRECAUTIONS A PRENDREDANS LEE CADRE D'UNE ANALYSE

+ Expliquer n’est pas justifier

+ Ca veut dire qu’il faut combiner une approche durkheimienne (caractéristiques des individus) à une approche weberienne (signification que les individus donnent à leurs actes)

+ Expliquer (dans une optique durkheimienne) c’est faire un lien entre la radicalisation et les caractéristiques sociologiques des individus et entre la radicalisation et les transformations de la société.

+ Dans une optique weberienne, comprendre n’est pas compatir mais trouver le sens que les individus donnent à leurs actions

+ Dans l’optique de la « sociologie cognitive », il faut faire émerger les biais cognitifs qui expliquent a pense ou le passage à l’action.

+ Il n’y a pas d’automaticité entre les caractéristiques sociales d’un individu et un passage à l’acte. Entre les deux il y a l’action individuelle qu’il convient de décrypter

+ Il faut distinguer les enquêtes selon qu’elles sont qualitatives ou quantitatives. Quantitatif c’est repérer les caractéristiques sociales des individus (diplôme, …) ou relever les réponses à un sondage. Qualitatif, c’est les entretiens ou les observations

+ Tenir compte de la population étudiée : interroger des lycéens n’est pas la même chose qu’enquêter sur les auteurs d’un attentat.

+ Se rappeler que les sujets peuvent constituer une minorité dans leur groupe (les djihadistes ne constituent qu’une infime minorité des musulmans) donc éviter les amalgames

+ Eviter les biais de symétrie : si tous ceux qui sont passés à l’acte ont des opinions radicales, tous ceux qui ont des opinions radicales ne passent pas à l’acte. Mais il ne faut pas pour autant négliger les diverses caractéristiques

 

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